jeudi 28 août 2008

La traînarde

Mon année sur les ailes du récit / texte 28/ 29 Août 2008

La traînarde

Ce n'est pas de ma faute si ma mère m'avait appris qu'une femme doit savoir se faire attendre ! Depuis toute petite j'ai pris l'habitude de trainer un peu les pattes, jusqu'à ce que la lenteur soit devenue, pour moi, une seconde nature. Ma mère s'en était trouvée, à la fin, elle-même, incommodée par ce qu'elle m'avait appris. Tout ce qui se fait en une minute me prend, le plus naturellement du monde, un petit quart d'heure. Surtout quand il s'agit de me préparer à sortir. Il me faut, alors, consacrer toute une heure, rien que devant le miroir.


Des retards à répétition, c'est effectivement embêtant. Surtout pour les hommes qui croient que je le fais exprès, juste pour les faire attendre. Ils ont tout à fait raison d'y penser ; mais ils se trompent. Ils ont raison parce que je suis toujours en retard, même quand je promets d'être pile à l'heure. Et ils se trompent parce que j'ai vraiment horreur d'être en retard. Oui! Et le comble, c'est que je ne me rends compte de mon retard qu'une fois arrivée sur les lieux du rendez-vous. C'est là que, croyant être à l'heure, je vérifie à mes dépens que je ne le suis pas!
Mais jamais je ne l'ai fait exprès. La preuve c'est qu'à bien y penser, chacun de mes retards, a son explication logique et sa cause indépendante de ma volonté. Que de fois je l'ai démontré à Ghazi par A plus B. Mais, pour lui, je fais partie de ces femmes qui savent profiter pleinement de l'amour qu’on leur porte et qui ont toujours le prétexte qu'il faut pour expliquer l'inexplicable et justifier l'injustifiable.
*****
Ghazi, c'était mon fiancé. Depuis huit mois que nous nous connaissons, j'ai vérifié que, sous tout rapport, c'était bien lui, l'homme idéal pour moi. Pour le reste, sachant que l'amour viendrait avec la vie commune, j'ai commencé à me permettre de lui répondre, de temps en temps, que moi aussi, je l'aimais.
Quant à lui, il m'a donné toutes les preuves qu'il m'aimait à la folie, qu'il me trouvait parfaitement à son goût et que je serais vraiment la femme idéale pour lui, si seulement je cessais de venir en retard à chacun de nos rendez-vous ! "Tout est bien en toi, m'expliqua-t-il, et je t'ai montré à quel point je savais faire des concessions. Seul ton retard constitue un signe de mépris que je ne saurais admettre de toi !"
Pour bien me montrer qu'il ne plaisantait pas, par trois fois il décida, alors que nous nous étions déjà retrouvés au café des Chaouachia, à quelques mètres du Souk El Birka, de remettre à un autre jour l'achat de la bague de fiançailles : "Je ne te l'achèterai, me jura-t-il, que situ es à l'heure. La moindre des corrections serait tout de même de ne pas me faire attendre le jour où je t'achète ta bague de fiançailles, non !"
La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, il n'était même pas resté en ma compagnie, au moins, le temps que je boive un café. Réellement en colère, il était parti après m'avoir fixé rendez-vous, à sa seule convenance, pour ce matin, dix heures pile et en m'avertissant que ce serait la dernière fois, avant qu'il ne prenne une décision encore plus ferme.

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Je n'avais pas du tout aimé son ton menaçant, mais, en mon for intérieur, je lui ai donné raison. Car, c'est vrai que mes retards devenaient insupportables et ressemblaient fort à des actes prémédités.
Je passai toute la journée d'hier à penser que, peut-être, quelque chose d'inconscient me poussait à le faire exprès sans m'en rendre compte. J'en étais même arrivée à me poser le plus clairement du monde la question : voulais-je vraiment me marier avec lui, oui ou non ? Et la réponse était sans équivoque : oui ! Oui, c'était bien lui l'homme qu'il me fallait et je n'avais qu'à faire un peu plus attention pour ne plus froisser sa fierté avec des comportements aussi stupides.


Le soir, je veillai à régler l'alarme de mon téléphone portable pour me réveiller à six heures du matin, et elle sonna à l'heure. Aussitôt réveillée, je la réglai pour m'avertir afin que je sorte à neuf heures et, à neuf heures pile, la sonnerie retentit et j'étais déjà prête à sortir. Arrivée aux souks de la vieille Médina, vers neuf heures et demie, j'avais tout mon temps pour ne pas manquer mon rendez-vous ; mais je me dis qu'il n'était pas question de m'attabler au café, une demi-heure à l'avance. Aussi réglai-je l'alarme de mon téléphone sur neuf heures cinquante cinq et me mis-je à me promener au souk Elbirka repérant la plus belle des bagues de fiançailles.
En regardant les bijoux dans les vitrines, je me surpris à penser à Ghazi. Je me vis en pleine cérémonie de fiançailles, lui tendant la main pour qu'il me mette la bague au doigt et me disant qu'après tout, il avait bien fait de se montrer ferme avec moi. Il me parut que je venais, enfin, d'en tomber amoureuse.
Soudain, j'entrai dans une boutique où la montre accrochée au mur affichait vulgairement dix heures et trente minutes. Je n'en revins pas ! Terrifiée à l'idée de rater réellement mon rendez-vous, cette fois-ci aussi, je retirai mon téléphone portable de mon sac à main pour vérifier l'heure et le trouvai désespérément éteint.
Tout en tentant de l'ouvrir, je courus à une vitesse qui éveilla les suspicions des bijoutiers de Souk El Birka. Arrivée au café et n'y trouvant personne à m'attendre, j'appelai Ghazi pour m'excuser et lui expliquer les raisons de mon retard, mais son téléphone aussi, était désespérément fermé.

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Ce n'est que vers six heures de l'après midi qu'il me donna signe de vie. J'avais déjà préparé un beau message pour lui déclarer solennellement mon amour par email. Mais voilà que je reçus de lui le message dont voici la teneur :

"J'ai enfin compris que tu ne veux pas de moi. J'ai déjà quitté mon appartement pour un autre. J'ai changé mon numéro de téléphone portable et je m'en vais tout de suite détruire ce compte email. Je t'ai réellement aimée, tu sais ! Mais… adieu."

Le Haïkuteur – Ras Jebel

jeudi 21 août 2008

La fourrière

Mon année sur les ailes du récit / texte 27/ 22 Août 2008

La fourrière

Nous étions quatre jeunes de moins de dix-sept ans. Le cinquième semblait être un fils à papa, qui n'avait pas encore vingt ans et dont tous les vêtements étaient "signés". C'était un jeune qui n'avait jamais fait partie de notre bande, que je n'avais jamais rencontré auparavant et qui avait réussi à amadouer sa maman pour qu'elle lui prête sa petite voiture pour la journée. Et nous voici tous les cinq partis de Douar Hicher en direction de Tunis, pour nous rendre, ensuite, à la Marsa. Et à nous la plage !


Fils de familles paisibles, nous étions, néanmoins, quatre à n'avoir pas le sou. Mais ce n'était pas une raison pour renoncer à faire la fête. Nous étions tous "Espérantistes" et il nous suffisait pour nous sentir heureux, de chanter nos "Força Tarajjy", en passant nos têtes par la fenêtre pour pousser des cris de dépit envers les jeunes "Stadistes" ou "Clubistes Africains", chaque fois que nous en croisions quelques uns en chemin.
Quant à Karim, car c'est de lui qu'il s'agit ici, il avait l'air sérieux et possédait quatre cartes de crédit dans son portefeuilles. Son père lui avait ouvert quatre comptes dans quatre banques différentes, pour que si l'argent venait à manquer dans l'un des distributeurs automatiques, il puisse en retirer dans un autre. C'était, en tout cas, l'explication qu'il nous avait donnée.
Comme c'était Karim qui nous invitait, nous offrant "une journée gratis tout compris", même les cigarettes, il devait aller retirer de l'argent dans un distributeur de l'Avenue Habib Bourguiba. Nous nous sommes donc garés sur l'Avenue et sommes tous descendus pour l'attendre à quelque distance de la banque. Mais voilà que le distributeur sur la grande Avenue manquait, effectivement, de billets. Et Karim de disparaître dans l'Avenue de Paris pour en chercher un autre, tout en nous faisant signe de faire attention à la voiture de sa maman.

*****

A peine cinq minutes plus tard, la camionnette à grue de la police municipale arriva. Un agent et un ouvrier en descendirent et commencèrent à atteler la voiture de Karim à la camionnette pour que le conducteur puisse la remorquer. Nous nous adressâmes tous les quatre au policier pour tenter de l'en empêcher, le suppliant de renoncer à son action ou du moins d'attendre une petite minute, que le propriétaire de la voiture revienne. Mais il était catégorique :
- "Ici, l'arrêt et le stationnement sont strictement interdits. Votre voiture est bonne pour la fourrière."
Nous avions beau expliquer à l'agent que nous étions pressés, que l'argent manquait dans le distributeur de la banque sur l'Avenue, que notre ami avait d'autres cartes pour retirer de l'argent d'un distributeur tout proche, à l'Avenue de Paris et qu'il n'allait donc pas tarder à revenir. C'était peine perdue ! Voici que la remorqueuse municipale démarrait, en emportant la voiture que nous nous étions engagés à surveiller.
Nous commençâmes à courir derrière la remorqueuse qui s'engagea, précisément, dans l'Avenue de Paris. Lorsque nous vîmes Karim de loin, nous l'appelâmes de toutes nos forces et il arriva pour courir avec nous après la remorqueuse. Il s'adressa alors à l'agent, avec son habituel sang froid, mais d'une voix quelque peu efféminée :


- "S'te plait m'sieur l'agent, fais un geste pour ton frère, un pauv' jeune. J't'assure que c'est absolument inutile, pour la municipalité, de met' c'te voiture en fourrière. Mon père la sortira sans le moindre sou. Tu va seulement réussir à m'priver d'argent d'poche pendant une semaine. S'te plait, m'sieur l'agent, j'peux déprimer à nouveau et ce sera d'ta faute."
Mais comme l'agent était inflexible, Karim s'arrêta net de courir et nous demanda de faire de même. Admiratifs devant le talent d'acteur de Karim, nous laissâmes la remorqueuse municipale poursuivre sa route vers la fourrière et le suivîmes.

*****

Karim nous conduisit à proximité d'un regard d'évacuation des eaux usées. Il nous organisa en ronde autour de lui et commença à brandir une liasse de billets de banque valant deux fois le salaire que percevait mon père en tout un mois de labeur. Tenant trois bonnes centaines de dinars d'une main et de l'autre les clés de la voiture, Karim laissa soudain tomber les clés dans le regard avant de rompre la ronde et de nous dire en rigolant :
- Bof, laissez tomber les gars. J'vous ai promis une journée, tout compris, à La Marsa ; compris ? Ben moi j'tiens ma parole ; compris ? L'argent est là, j'pourrais y aller en TGM (train Tunis-La Marsa), mais moi, j'tiens à y aller en voiture ; compris ? Allez donc m'attendre sur l'Avenue Mohamed V. J'vous rejoins dans dix minutes chrono : j'en aurais chipé une autre toute neuve; compris ?


C'est là que je pris réellement peur. Karim ne jouait plus du tout la comédie. Il nous quitta pour s'engager dans la première rue à droite, s'arrêtant au niveau de chaque belle voiture pour vérifier si l'une de ses portières était restée ouverte.

Le Haikuteur – Ras Jebel

jeudi 14 août 2008

Crise de nerfs

Mon année sur les ailes du récit / texte 26/ 15 Août 2008

Crise de nerfs

Depuis toujours, Emna soupçonnait Anour d'avoir des relations extra conjugales. Elle le disait ou le laissait entendre à travers sa manie de fouiller dans ses affaires, de renifler ses habits, d'épier ses moindres faits et gestes et d'interpréter ses moindres réflexions.


Quant à lui, Il était dans la situation de ces hommes peu satisfaits de leur vie conjugale, mais soucieux, pour de multiples raisons, de préserver le couple. Il ne cessait de lui jurer qu'il n'avait qu'elle dans sa vie, qu'il lui était fidèle par principe plus que par obligation maritale et que, sachant qu'elle avait toujours des soupçons, seule une patience surhumaine pouvait maintenant l'empêcher de succomber à la tentation de la tromper réellement, ne serait-ce que par dépit !
Ce soir là, Anouar se rasa la barbe, prit une bonne douche et mit sa plus belle tenue, en vue d’une réunion de l'Association des Anciens Champions des Sports Individuels, où il devait veiller très tard. Leurs deux enfants étaient en colonie de vacances et, pour ne pas s'ennuyer, Emna avait prévu de passer la soirée avec Sara, sa meilleure amie, qui était déjà arrivée en voiture pour la chercher.
Tout à coup, Anouar reçut un appel téléphonique. Il parut fortement embarrassé en informant sa femme qu'il devait sortir de suite et qu'il lui expliquerait tout, plus tard. Pour elle, c'était clair qu'il allait à la rencontre de sa maîtresse, mais elle fit mine de n’avoir rien compris. Et Anouar de filer tout de suite en voiture, ne se doutant pas un instant que sa femme s'était préparée, de son coté, à toutes les éventualités. Aussi ne remarqua-t-il pas cette voiture qui s'était mise à le suivre de près. Il ignorait tout de cette véritable filature qui s'était aussitôt déclenchée, rappelant les péripéties des films policiers.
L'oreille rivée à son téléphone portable, la pauvre Emna était, bien évidemment, aux commandes de l'opération. Conduite par son amie Sara, elle suivait maintenant de loin, la voiture de son mari, aidée par les indications téléphoniques lui décrivant son itinéraire, à partir d'une troisième voiture.
*****
Emna ne tarda pas à s'aventurer dans l'une de ces cités précaires, sales et sans aucune infrastructure. Une cité dont elle ne soupçonnait même pas l'existence. Il faisait déjà noir et Emna, qui tremblait déjà à l'idée d'une simple crevaison, se confondait en excuses auprès de Sara de l'avoir amenée dans cet endroit inhospitalier.
Mais elle était encore plus triste de constater que sa rivale n'était qu'une fille des bidonvilles, ce qui l'enragea. Elle ne pensait plus qu'à coincer son mari indigne en flagrant délit. Elle ne lui ferait rien. Ce ne serait pas elle qui enverrait le père de ses enfants en prison, même s'il le méritait. Mais elle se ferait un plaisir de lui cracher à la figure ainsi qu'à celle de sa sale maitresse !
Elle reconnut maintenant la voiture de son mari, garée près d'une flaque d'eaux usées. La mort dans l'âme, elle descendit et s'aventura sans aucune peur dans une impasse très étroite où elle fut obligée de marcher quelques mètres, comme à califourchon, au dessus d'une rigole qui alimentait la flaque et qui conduisait tout droit vers une porte ouverte, offrant le spectacle désolant d'un patio des plus misérables.
*****
Anouar était là, assis sur une chaise de fortune, à coté de la porte fermée de l'unique pièce de la maison. Debout à côté de lui, un grand gaillard d'une quinzaine d'années pleurait comme un bébé qui venait d'être sevré. Etouffant sa surprise, Anouar se releva et invita sa femme à entrer en la présentant à Hosni, son poulain de l'équipe d'athlétisme :
- Allez, assez pleurer fiston ! Tu te rends compte que même ma femme s'est inquiétée pour ton papa. Elle m'a suivi jusqu'ici, certainement en taxi ! Allez, embrasse Tata Emna !


Puis il se retourna vers sa femme, lui présentant son élève en souriant:
- Voici Hosni dont je t'ai parlé. C'est le plus appliqué de mes coureurs de fond ! Tu ne devais pas t'inquiéter à ce point, ma chérie, tu sais ! Son papa va plutôt bien. Le médecin est déjà là qui l'ausculte dans la chambre, et l'ambulance est en route. Je crois qu'il ne s'agit que d'une simple crise de nerfs. Mais il lui faudrait peut être un peu de suivi médical. Car c'est la troisième fois que ça lui arrive depuis la mort récente de sa femme. C'est donc bien que tu sois venue et que vous ayez ainsi fait connaissance. Car, si son papa est hospitalisé, Hosni viendra habiter chez nous quelques temps !

Le Haikuteur - Tunis

jeudi 7 août 2008

Le défaut de Leila

Mon année sur les ailes du récit / texte 25/ 8 Août 2008

Le défaut de Leila

Je vous parlerai de Leila.

Mais je ne dirai rien de ses mérites. Car, que d'écrivains les ont vantés, que de poètes, dans de longs poèmes, s'en sont inspirés, que de beaux parleurs les ont prolixement cités et que de causeurs de nuit se sont épuisés à en tenter l'énumération, sans jamais parvenir à en atteindre les limites.



Si je devais parler de ses mérites, je me contenterais de dire que tout mérite est Leila dès qu'il frôle la perfection !

Je ne parlerai pas plus de son prénom. Un prénom tant déclamé, par les amoureux et les soupirants, par les joyeux et les mélancoliques, par les optimistes et les désespérés. En se le remémorant, apprend la délicatesse qui est de nature maladroit et se fait propre et parfumé qui a de tout temps été sale. En l'évoquant, l'aveugle voit et parle le muet. Et à l'entendre, combien de durs se sont amollis et de sauvages se sont soumis. J'ai scandé le nom de Leila et vu qu'il faisait éclore dans l'imagination les plus beaux rêves et cultivait dans l'âme avide les plus dangereuses des illusions. Le prénom de Leila suscitait, autour d'elle, la jalousie des filles et, autour de moi, la convoitise des garçons.

Si je devais parler de son prénom, je me contenterais de dire qu'un prénom est Leila tant que le rêve se fait délice.

Je ne parlerai pas, non plus, de son esprit. C'est qu'elle est sage et savante. Elle se fait entendre en parlant, elle enchante en conversant et elle convainc en polémiquant. J'ai jaugé son esprit et trouvé que sa sagesse pesait des centaines de Jezya Hilaliennes et mille et une Shéhérazade.

Si je devais parler de son esprit, je me contenterais de dire que l'esprit est Leila, dès que justice est rendue aux gens d'esprit.


Je ne vous parlerai point de sa morale. C'est qu'elle est la droiture ; nul besoin de loi ni de religion. En elle se vérifie ce qui fait de l'Homme un humain. Parmi les qualités de Leila, j'ai mesuré sa sincérité, son humanisme et sa fierté et admiré sa générosité, sa pureté et sa fidélité.

Si je devais parler de sa morale, je me contenterais de dire que la morale est Leila, tant que des nations croiront encore à la morale.

Je ne parlerai point de sa compagnie. C'est que Leila donne sans s'attendre à prendre et prend sans sous-estimer un don. Jamais elle ne sous-évalue son dû à qui n'est pas capable de bien évaluer le sien. Et qui se fait pour elle soutien trouve auprès d'elle mille appui. J'ai accompagné Leila. Elle était largesse en temps d'abondance, humilité en temps de puissance et, en temps de récession, satisfaction et patience. Elle conservait le secret, ne le divulguant même pas pour se défendre, tenait sa promesse, même au prix de sa vie, entendait son compagnon, avant même qu'il ne prononce le moindre mot et se tenait de son côté contre les aléas de son temps.

Si je devais parler de sa compagnie, je me contenterais de dire que c'est en compagnie de Leila que la vie sourit au compagnon!

Je ne vous parlerai point de ses yeux, car c'est de là que jaillissent les flèches de Cupidon, qui au premier regard terrassent ; ni de l'éclat de ses dents, qui au premier sourire ensorcellent ; ni de la grâce de son corps, car par sa démarche elle émerveille ; ni de ses senteurs, car par son apparition elle embaume ; ni encore de sa voix, car en chuchotant elle berce et en chantant elle délecte et enivre.

Si je devais parler de sa beauté, je me contenterais de dire que la beauté est Leila quand tous ses signes, réunis en un seul être, se font harmonie.

Je ne parlerai donc pas des mérites de Leila, mais de son défaut, plus grand que ceux de tous les humains. Car le défaut de Leila, toutes les qualités ne peuvent le camoufler. Et, à qui a encore des yeux, toutes les œillères par lesquelles l'amour aveugle, ne peuvent le cacher.



Le défaut de Leila est simplement que je… Le défaut de Leila est simplement que nous … Le défaut de Leila est simplement qu'elle … Le défaut de Leila est que … ce qui était entre elle et moi n'est plus !

Le Haikuteur - Tunis