jeudi 28 février 2008

Larme de papillon

Mon année sur les ailes du récit / texte 04 sur 53/ 29 février 2008



Larme de papillon




Je ne sais si cette tache de lumière jaune sur le mur de ton jardin me surprend, en ce moment, aussi fort qu'elle me surprit il y a quelques mois. Mais elle me cloue à ma place, exactement, comme elle m'y cloua il y a quelques mois !



Dès que j'ai entrouvert mes rideaux, avant d'aller m'endormir, pour jeter mon dernier coup d'œil quotidien sur la fenêtre de ta chambre à coucher, je compris que le volcan, qui était sur le point de se calmer, se révoltait de nouveau.

Voici une tache de lumière jaune, la même tache de lumière, sur le même mur. Elle est là, encore une fois, pour m'aviser : même si ta veilleuse était éteinte, tu n'étais pas endormie, comme toutes les nuits, depuis quelques mois. Je sais que la solitude est tuante pour qui a goûté, comme toi et moi, à la bonne compagnie. C'est pourquoi ta sortie ne m'énerva pas, ni n'éveilla en moi ma jalousie. Elle me donna plutôt de la peine pour toi.

Tu sais que personne ne serait plus content que moi de toute gorgée de bonheur qui étancherait ta soif, même si c'est moi qui en paierais seul le prix : cette amère sécheresse au fond de ma gorge. Mes yeux se perdant dans cette tache de lumière jaune, qu'est ce que je souhaiterais, à cette heure tardive, que tu sois partie boire un verre tout nouveau, plus limpide et plus exquis ! Et qu'est ce que j'espèrerais que tu sois allée rencontrer la lumière de l'aube nouvelle que j'appelle sincèrement, pour toi, de tous mes vœux, depuis que je compris que jamais, quoi que je fasse, ma maigre bougie ne saura éclairer ta vie autant que l'éclat naturel du premier amour.

Mais voici que s'accélèrent les battements de mon cœur, comme pour m'alerter de ton millième retour au sein du même feu qui avait grillé, avant toi, des millions de papillons. Il se pourrait que tu sois maintenant au sommet de ta délectation du bonheur offert par ton fiévreux instant, volé à un temps qui, tu le sais parfaitement, ne reviendra jamais. Mais il se pourrait bien que, grelottant sous ce crachin glacial, tu marcherais déjà en ruminant, encore une fois, la déception de ta millième rencontre furtive avec lui. Le cœur plein de rancune contre sa nouvelle compagne, tu en voudrais à cette pauvre femme d'avoir accepté de lui accorder refuge, au moment où, toi, tu avais choisi de le laissé tomber.

Il se pourrait même, qu'en ce moment, ta fureur contre elle m'ait déjà atteint, à mon tour. Et, pour la millième fois, tu serais en train de me maudire, regrettant toujours ce jour où, fuyant pour la première fois la sauvage colère de ton premier mari, tu t'étais, par pur hasard, réfugiée chez moi.

Il se pourrait bien, comme il ne se pourrait pas du tout ! Mais, moi, je resterai debout, ici, derrière les rideaux de ma fenêtre, à regarder la tache de lumière jaune et à griller sur les braises de mes appréhensions. Car j'ai toujours craint, pour toi, la conduite de nuit et la nervosité de tes mains au volant de ta voiture. Et, en ce moment, quelque chose me dit que tu serais en train de conduire, n'importe comment, sur une chaussée mouillée.

Ici, je resterais pour t'attendre, pour attendre, comme il y a quelques mois, que disparaisse cette tache de lumière jaune sur le mur de ton jardin. Alors, je descendrais pour vérifier si tu n'aurais pas sciemment oublié de fermer ta porte… comme tu l'avais fait voici quelques mois. Et alors, ma jeune voisine et non moins ex-épouse, alors peut-être, te suivrai-je, encore une fois, chez toi, pour me contenter d'essuyer ta dernière larme, avant que tu ne te laisses endormir, la tête sur mon genou, comme c'était déjà arrivé, voici quelques mois.



Le Haïkuteur - Tunis

2 commentaires:

Anonyme a dit…

bien �crit...

Anonyme a dit…

Il meurt lentement...

Celui qui ne voyage pas,
Celui qui ne lit pas,
Celui qui n'écoute pas de musique,
Celui qui ne sais pas trouver grâce à ses yeux.

Il meurt lentement...

Celui qui devient esclave de l'habitude
Refaisant tous les jours les mêmes chemins,
Celui qui ne change jamais de repère,
Ne se risque jamais à changer la couleur de ses vêtements,
Ou qui ne parle jamais à un inconnu.

Il meurt lentement...

Celui qui évite la passion et son tourbillon d'émotions, celles
qui redonnent la lumière dans les yeux et réparent les coeurs blessés.

Il meurt lentement...

Celui qui ne change pas de cap lorsqu'il est malheureux
au travail ou en amour,
Celui qui ne prend pas de risques pour réaliser ses rêves
Celui qui pas une seule fois dans sa vie, n'a fui les conseils sensés.

Vis maintenant ; risque-toi aujourd'hui !
Agis tout de suite !
Ne te laisse pas mourir lentement !
Ne te prive pas d'être heureux !

Texte de Pablo Neruda


amigo un sourire de Maria Paloma